Bonjour Bruno,
Bonjour Bernard,
Bonjour Thierry,
Bonjour à tous mes compagnons Chasseurs,
Je réponds sur un vaste et grand sujet qui date déjà (03/03/2007) traitant de la prise du drapeau du 132e poméranien.
La gravure que l’on aperçoit actuellement ne ressemble en rien à la prise du drapeau Poméranien, mais elle est authentique (je la possède aussi)
Le retentissement de cette prise d’un drapeau allemand par des soldats Français obtînt un tel rebondissement que la Presse de l’époque c’est amusé follement en présentant cette action « en plein combat » cela avait plus de gueule, que de la montrer réellement.
Je vais vous conter et vous faire voir ce fait. Et si je peux répondre à des questions, je le ferais volontiers.
Combat de Saint Blaise (Alsace)
Prise du premier drapeau allemand
(Le 14 août 1914)
Le 1er bataillon de Chasseurs à pied, sous le commandement du chef de bataillon TABOUIS, après avoir passé aux avant-postes, aux environ de Bourg-Bruche, Les journées des 12 au 13 août se mirent en marche le 14 au matin, dans la direction de Schimeck, en suivant la vallée de la Bruche. Le bataillon formait l'avant garde de la division. Devant, sur sa droite: Saint-Blaise, au centre, une première hauteur boisée au-delà d'un vallon emprunté par le chemin conduisant de Saint-Blaise à Saulxures, au pied de la crête constituant la frontière; tout à fait sur la gauche et en avant, Plaine; au deuxième plan, la hauteur de Diespach, ils savaient depuis la veuille que l'ennemi poursuivait sur cette colline la construction de retranchements qui paraissaient très solide et sont même précédés par des réseaux de fils de fer barbelés.
A 6 heure du matin, la tête de l'avant-garde (2 compagnie) est accueillie, à deux ou trois cents mètres de Saint-Blaise, par une violente fusillade (les Allemands faisaient déjà usage de procédés auxquels nous ne nous attendions guère; Le clocher de l'église de Plaine abritait des mitrailleuses.) Grâce à l'énergie du capitaine commandant la 2e Cie et au sang froid de tous, cette unité parvenait à se déployer sous les balles qui balayaient la route. Successivement, la 3e Cie se déploya sur sa gauche de la 2e. La 4e Cie venait occuper une croupe, en partie boisée, surmontée d'une chapelle.
Pendant que cette compagnie prenait sous un feu une partie des retranchements étagés au-dessus du village, les 2e et 3e Cie progressaient dans Saint-Blaise A 8 heure, le sous-lieutenant GAILLOT, de la 4e reçoit l'ordre de découvrir une mitrailleuse qu'ils entendaient tirer sur la gauche, vers Plaine, sans pouvoir en définir l'emplacement.
Blessé, il renvoie les Chasseurs qui l'accompagnaient pour les soustraire aux balles inévitables et resta plus de 3 heures entre les lignes, attendant avec confiance que notre progression vienne le dégager. Il assista pendant plusieurs heures avec satisfaction à un bombardement méthodique sur les retranchements ennemis.
Peu à peu, l'artillerie allemande cessa son tir et, vers 5 heures de l'après-midi, le Bataillon se lance résolument à l'assaut de la colline qui domine, au nord, la route Plaine à Plaine Saint-Blaise. De gauche à droite, la 6e, la 5e ,la 3e, et la 2e compagnie-dépassant la 4e , qui avait reçu l'ordre de rester en soutien et de nettoyer le champ de bataille.- commencèrent à gravir les pentes. Le Bataillon progresse rapidement, faisant de nombreux prisonniers. A la nuit, les Chasseurs étaient maîtres des hauteurs nord de Saint-Blaise où l'ennemi avait accumulé les défenses, les munitions et même les vivres pour une résistance de plusieurs jours. Deux cent cinquante prisonniers prenaient, vers 19 heures la route de Saales.
C'est au cours de la nuit que nos petits chasseurs apprenaient d'une façon presque certaine la présence toute proche d’un drapeau d'un régiment Allemand. Le 14 août, dès l'aurore, le capitaine MOREAU, commandant la 3e Cie, donna des ordres pour s'emparer de la ferme où il supposa qu'il soit caché et où quelques blessés gisaient encore. Après une fouille minutieuse de la ferme, les Chasseurs découvrîmes, cacher sous la paille, ce drapeau ennemi. C’était celui du 132e régiment d’Infanterie allemande (1er régiment de la Basse –Alsace) (*) et le premier drapeau qui tomba aux mains des Français.
Un butin énorme était pris dans ce village : canons, chevaux, cuisines-roulantes, fusils, équipements divers, etc. tombaient entre nos mains.
C’est à la 5e compagnie que revient l’honneur de s’être emparée du drapeau. « les Chasseurs ont été chaudement félicités par leur chef, qui s’est montré très fier de commander de tels soldats qui, par leur courage, leur valeur et leur sang-froid, ont réussi à inflige à l’ennemi une éclatante défaite.
Le premier drapeau à Paris (dans un texte d’une revue de 1917)
Lorsqu’on sut ici, en plein Paris vibrant et vivant, l’arrivée du premier drapeau allemand capturé, ce fut comme une sorte d’avertissement électrique qui gagna la foule et se propagea rapidement. Aussi de très bonne heure dans l’après-midi, la rue Saint-Dominique vit-elle défiler des milliers de Français,-et de Françaises- avides de jeter un coup d’œil sur un témoin d’une de nos premières victoires. Défilé d’ailleurs admirable de dignité et de calme dans l’enthousiasme. Pas de cris, pas de bavardages, pas de manifestations insultantes. Un courant général de fierté et d’espoir.
Le drapeau avait été hissé au dessus de l’entrée centrale du ministère de la Guerre, à la fenêtre du 1er étage.
Le 132e régiment d'infanterie ! (ouvrons un annuaire militaire allemand.) Il appartenait au XVe corps qui tenait garnison à Strasbourg. Il figurait avec cette mention : (132e d’Infanterie, 4e régiments de Basse –Alsace (Strasbourg). C’était un régiment « Alsacien », car les régiments allemands appartenaient effectivement à chacun des Etats confédérés. Il y avait des régiments prussiens, Badois, Saxons, Bavarois, etc. Depuis que l’Alsace et la Loraine étaient représentées au conseil fédéral, il y avait aussi des régiments Alsaciens. Et ces régiments, comme ceux des autres Etats confédérés, avaient leur drapeau particulier.
Ce drapeau a été inventé par l’Empire allemand pour les provinces qu’ils détenaient depuis quarante-quatre ans au mépris du droit. C’était un drapeau « alsacien ». Amère dérision. Mais quel heureux et symbolique présage dans ce premier exploit des armes Françaises en Alsace !
Définition de ce drapeau Poméranien.
Une grande croix de Saint-André toute blanche sépare ce drapeau allemand en quarts triangles rouges. Ce rouge ! Est indéfinissable. C’est un rouge faux, une sorte de framboisé, dont rien ne peut, dans nos couleurs militaires, donner l’équivalent ; c’est un rouge, en un mot, qui n’était pas d’ici.
Sur ce rouge et blanc tranche du noir et de l’or. La croix s’élargit au centre en un ovale : un aigle noir s’y éploie, durement découpé. Ce motif est surmonté, en or, de la couronne impériale. Rouge, blanc, noir, ce sont les couleurs de l’Empire. Dans chacun des triangles rougeâtres est une grenade brodée or. Aux quatre extrémités de la croix, donc aux quatre angles du drapeau, un monogramme rouge surmonté d’une petite couronne, également dorés. Une cordelière et un gland d’argent pendent à la hampe, qui se termine par un fer de lance ajouré d’un travail compliquer et précieux.
« Regarde-le bien mon garçon. Regarde-le ! Et souviens-toi de cela toute ta vie ! »
…On portera aujourd’hui aux Invalides le premier drapeau arriéré conquis par les soldats du droit…
Note sur le drapeau capturé à St Blaise
M. VIEHHAUSER (paix à son âme) qui avait assisté personnellement à l’aube du 15 août 1914, à la présentation au Cdt TABOUIS (qui avait passé la nuit sur les bottes de blé) du drapeau du 132e poméranien pris par le sergent FOULFOIN qui l’avait capturé dans une grange. Entouré de son petit état-major et de la section hors rang, le Cdt TABOUIS les larmes aux yeux, s’exclama : « mes petits, vous vouliez de la gloire, et bien, en voilà !... ».
Le drapeau ayant été ultérieurement conduit à l’arrière par un détachement de 10e BCP, qui était en réserve, il en résulta une confusion dans la presse et les marchands de souvenirs, mais la vérité fut rapidement rétablie.
Voilà la (vérité ?) sur la capture du 132e poméranien.
Michel Chantriaux
Le 8e toujours debout
(*) Source « le Cor de Chasse de 1961 » Article de l’amicale du 1er sur la prise d’un drapeau capturé à St Blaise.
Voici 3 illustrations (comiques des illustrateurs de l'époque)